La littérature générale, un mythe

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Une infinité de visages qui conduisent ailleurs… Lequel préférez-vous?

Vous avez peut-être déjà entendu des propos du genre « la science-fiction/le fantastique/la fantasy/l’épouvante [au choix] n’est pas de la vraie littérature ». Des amis qui tâtent du crayon vous ont peut-être affirmé faire de la « vraie littérature », grimaçant quand vous leur avez avoué votre intérêt pour les fictions de genre. Quand vous avez feuilleté des revues littéraires en kiosque, vous avez vu que certaines se consacrent à la « littérature générale » et excluent tout ce qui relève du fantastique, de la science-fiction, de la fantasy et de l’épouvante. Parfois, ces dernières sont regroupés sous l’appellation «paralittérature».

Depuis le temps que je fréquente le milieu de la SFFQ, j’ai vu beaucoup de gens s’intéresser à cette distinction entre littérature dite « générale » et littérature dite « de genre ». Certains en débattent continuellement, comme pour justifier la pertinence des littératures de genre aux yeux d’une certaine critique, ou, au contraire, pour la discréditer.

Je dois l’avouer, j’ai volontairement choisi de ne plus m’intéresser à ces débats.

D’une part, la distinction entre littérature générale et littérature de genre ne m’a jamais été utile pour écrire ou imaginer des histoires. Je doute qu’il soit essentiel à un auteur de réfléchir à cette question.

D’autre part, mon cheminement personnel et littéraire ne favorise pas l’adhésion à cette distinction. Sur le plan personnel, étant fils de musiciens et mélomane incurable, j’ai passé des heures à explorer la musique dite « classique », pour réaliser que, sous ce terme, on regroupait plusieurs styles musicaux très différents. En fait, le terme « musique classique » est un terme apparu récemment, en opposition à l’expression « musique populaire ». Pourtant, il fut un temps où, peu importe son appartenance à une élite ou au peuple, on allait écouter des concerts sans se préoccuper de classifier la musique… La même chose s’observe pour la littérature : avant l’invention du terme « science-fiction » vers 1929, les romans de H.G. Wells étaient vendus avec les autres sans qu’on se soucie des étiquettes.

Tout comme le concept de musique classique, le concept de littérature générale (générale, mais paradoxalement exclusive) décrit mal la réalité. J’irais jusqu’à dire qu’il oriente la réflexion littéraire dans des ornières. À mon sens, on doit le jeter à la poubelle ! :-p Et idem pour le concept de «paralittérature».

Le livre d’Oscar Collier, qui m’a aidé à écrire, n’opposait pas une « vraie littérature » ou une « littérature générale » à une littérature « parallèle » incluant la science-fiction, le fantastique, la fantasy, l’épouvante (et le polar). Pour guider le futur écrivain, Collier se contentait plutôt de lister une vingtaine de catégories de romans. Chacune d’elles était un genre littéraire en soi. Cette classification en vaut sûrement une autre, mais je la trouve très inspirante.

Classification des genres romanesques de Collier

  • Romans « grands publics ».
  • Romans littéraires.
  • Romans de guerre.
  • Romans comiques.
  • Romans philosophiques.
  • Romans à « message ».
  • Romans religieux.
  • Romans érotiques et pornographiques.
  • Action/aventure/thriller.
  • Romans sentimentaux.
  • Roman historiques.
  • Westerns.
  • Science-fiction et romans fantastiques.
  • Romans d’horreur et d’occultisme.
  • Romans policiers.
  • Histoires d’animaux.
  • Romans médicaux.
  • Romans interactifs (c-a-d. les livres dont vous êtes le héros).
  • Romans didactiques.
  • Jeunesse/jeune adulte.
  • Les inclassables.

Selon moi, il n’y a pas de littérature générale, de littérature spécialisée, de vraie ou de fausse littérature, ou de paralittérature. Il n’y a que la littérature et celle-ci possède des dizaines de visages. Certains d’entre eux me parlent, d’autres non.

Aujourd’hui, les visages qui continuent de me parler, et avec lesquels j’aime le plus discuter, sont la science-fiction, le fantastique, la fantasy et l’épouvante. D’autres visages, comme les romans d’autofiction, ne me disent rien et je n’ai rien à leur dire. C’est purement personnel – et c’est très bien ainsi.

L’important n’est pas de décider quels visages sont les plus pertinents, ceux que tout le monde devrait aimer. L’important, pour vous, est d’identifier ceux qui vous plaisent et avec lesquels vous avez envie de discuter. Ceux-là, vous aurez envie de les enrichir avec vos œuvres.

Références

Collier, O. & Leighton, F.S. (1991). Votre premier roman : comment l’écrire et le faire publier. Montréal : Les Presses d’Amérique : 42-46.